LETTRE DE « STOP ÉOLE » A NICOLAS HULOT

Cette lettre pourra vous paraître un peu longue, mais quel punch !!!… quels arguments !!!…
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STOP ÉOLE
Collectif Auvergne
Place Vallat
43450 Blesle
le 12 janvier 2018,
LETTRE OUVERTE
à
Monsieur Nicolas Hulot,
Ministre de la Transition Écologique et Solidaire
Objet : Régression du droit de l’environnement par l’effet de la simplification des procédures d’implantation des éoliennes industrielles
Monsieur le ministre, nous estimons votre contribution au renouvellement de la façon de faire de la politique et c’est la raison pour laquelle nous nous permettons de prévaloir auprès de vous une démarche de vérité.
Vous faites appel dans toutes vos interventions sur les ondes (au Téléphone Sonne sur France Inter le 11 décembre 2017 notamment) au civisme des français concernant l’implantation des centrales éoliennes; vous faites appel à leur responsabilité.
Vous répondiez même à un auditeur qui vous alertait du fait de subir les nuisances visuelles de 187 éoliennes dans un rayon de 15 kilomètres autour de son domicile en substance, que «vous compreniez cela » mais vous déclariez «lui retourner la question».
«On fait quoi?», lui demandiez-vous; «on met une centrale à charbon ou une centrale nucléaire ?»Et vous affirmiez :«c’est très subjectif !»
Non, rien de subjectif en tout cela: c’est un fait, les éoliennes industrielles sont objectivement préjudiciables au cadre de vie des riverains qu’elles encerclent de près et de loin.
Tel est le fondement, vous ne pouvez l’ignorer, de la résistance civique que vous déplorez ; à savoir l’opposition des personnes confrontées à la réalité de cette dégradation de l’environnement par les pollutions sonores, stroboscopiques et visuelles des éoliennes géantes ; rien d’autre !
Seriez-vous adepte de l’écologie punitive ?
Refuseriez-vous d’être solidaire avec les habitants de nos territoires ruraux à l’habitat dispersé ?
Nous aussi donc, nous vous retournons votre question :
«Hors sol», ne serez-vous pas responsable de la dégradation substantielle de l’environnement que vous engagez en renforçant la simplification des procédures d’autorisation préalables à l’implantation des centrales électriques éoliennes ?
Cela de fait, sous la pression harcelante depuis le Grenelle de l’Environnement des lobbies financiers éoliens, leur chant de sirènes sur leur rôle prétendu dans la lutte contre le réchauffement climatique.
La première responsabilité, n’est-elle pas la vôtre, celle de l’État ?
Le principe de non régression est affirmé depuis longtemps par le droit européen
Depuis l’Acte Unique de 1987, la finalité de la politique environnementale européenne est «la préservation, la protection et l’amélioration de la qualité de l’environnement». L’Union exige même un «niveau élevé» de protection et d’amélioration de l’environnement dans ses différentes directives et la Cour de justice de l’Union européenne œuvre en ce sens.
Cette position est déterminante concernant la responsabilité des États Membres en matière de santé, de sécurité et d’environnement : l’article 193 du Traité sur le fonctionnement de l’Union engage les États membres à prendre eux-mêmes des mesures de protection renforcée.
Déjà, le rejet par le Conseil d’État français au visa notamment de la directive 2001/42/CE du Parlement Européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, des pourvois de Mme Ségolène Royal contre l’annulation des schémas
régionaux pour l’éolien terrestre élaborés en France dans les années 2012 devrait vous alerter (arrêt CE n°401116 Ministère de l’environnement, de l’Énergie et de la mer c/ Elisabeth Panthou-Renard et autres du 18 décembre 2017 pour l’Auvergne notamment).
En aggravant les mesures de régression du droit de l’environnement déjà constatées, vous engagerez aussi vous-même la responsabilité de la France, au risque que celle-ci soit sanctionnée par le juge européen également.
La Charte française de l’environnement à valeur constitutionnelle de 2005 engage également votre responsabilité puisqu’elle dispose en son article 2 que «
toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement. Ce devoir oblige en conséquence l’État et donc le législateur et le pouvoir réglementaire.
Déjà le principe de non régression des intérêts environnementaux protégés a été mis à mal avec les atteintes au droit à
– la santé avec l’abaissement pour les éoliennes, par arrêté du 26 août 2011, du seuil de bruit toléré (dérogation à l’article R. 1334-32 du Code de la Santé Publique) ;
la sécurité avec la fixation d’un minimum de distance entre éoliennes géantes et habitations de seulement 500 mètres (loi sur la Transition Énergétique avec pour exemple déterminant l’accident d’éolienne du 1er janvier 2018 à Bouin en Vendée ) ;
au principe d’autonomie des collectivités territoriales avec la suppression de la planification ZDE et donc de l’avis conforme des communes ;
au droit à un recours effectif (fins de non-recevoir; délai contre l’autorisation environnementale unique expiré avant même la mise en service des éoliennes)
aux paysages avec les violations de l’article 12 de la convention de Florence sur le paysage édictant l’obligation de faire primer la règle la plus protectrice de l’environnement, du fait de la dénaturation des paysages par les implantations d’éoliennes hors échelle ;
– aux monuments historiques avec le refus d’une prise en compte efficiente des avis de l’Architecte des Bâtiments de France(rejet de l’amendement Barbier instaurant le principe de leur avis conforme dans un périmètre de protection en cas d’implantation d’éoliennes industrielles);
à l’environnement plus généralement, avec des évaluations environnementales sous la seule responsabilité des promoteurs et le caractère facultatif des consultations des commissions des paysages et des sites ainsi qu’avec l’autorisation environnementale unique corsetant le pouvoir des préfets avec
délais d’instruction drastiques et limitant le principe de participation du public. Nous vous demandons en conséquence, dans la réforme que vous envisagez, de ne pas mettre à mal les garanties légales nécessaires aux exigences de protection de l’environnement: notamment, en n’adoptant pas un régime d’autorisation simplifiée sur un modèle standardisé au niveau national méconnaissant les enjeux de chaque territoire et dispensant le promoteur de l’obligation de procéder à une étude d’impact sincère au cas par cas comme l’administration d’organiser une enquête publique.
Les annonces faites par les acteurs éoliens laissent apparaître une grave régression du droit de l’environnement sous couvert de simplification administrative,avec
– la limitation du droit à participation du public (enquête publique remplacée par une simple mise à disposition du public)
-la réduction du principe de prévention (remplacement de prescriptions techniques adaptées au cas par cas par des prescriptions nationales standardisées
; possibilité de dispense d’étude d’impact et de permis de construire en cas de repowering);
– la suppression d’une distance minimum vis-à-vis de l’habitat;
– la suppression du double degré de juridiction;
– la suppression de la condition de prise en compte des intérêts protégés par la législation ICPE.
Tout cela pour favoriser leurs intérêts, de façon pourtant antinomique avec la protection de l’environnement.
Vous ne pouvez ignorer le caractère peu performant de l’éolien intermittent dans la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. (cf. avis de l’Académie des Sciences du 19 avril 2017 rapportant en matière d’électricité d’origine éolienne le caractère dérisoire de 20% entre l’énergie garantie et la puissance installée. Vous ne sauriez donc habiller une action gouvernementale en faveur de l’éolien industriel colonisant toute la France et dégradant son environnement avec l’habillage de la notion d’intérêt général.
Nous vous demandons en conséquence, Monsieur le Ministre, respectant ainsi le principe de proportionnalité entre les enjeux en présence, de rétablir les fondamentaux de la procédure ICPE (enquête publique, étude d’impact, intérêts protégés) et de procéder au relèvement des seuils de tolérance légale et réglementaire en matière de bruit éolien, de distance entre centrales éoliennes, habitations et Monuments Historiques, dans un but d’amélioration de la protection de l’environnement, de la santé , du cadre de vie des riverains et du patrimoine culturel et naturel de la France.
Si au contraire, perdant de vue le fait que la France est habitée dans les territoires, riches de leurs patrimoines culturel et naturel, de leur biodiversité, de leur économie touristique, vous ne deviez pas prendre en compte le désarroi exprimé par les habitants et visiteurs, la perte de cohésion sociale face à la colonisation de l’industrie éolienne, l’État français serait responsable d’une grave atteinte au principe de non régression du droit fondamental de l’environnement, bien en dessous selon les termes de Michel Prieur d’ « un niveau adéquat de protection compte tenu des technologies disponibles».
Là, doivent être considérés dans vos arbitrages, les possibilités moins dévastatrices des autres énergies renouvelables…
Nous vous faisons confiance.
Très sincèrement et respectueusement,
Elisabeth PANTHOU-RENARD, présidente
pièces jointes :
– courrier à l’ANSES du 8 mars 2017
– courrier aux parlementaires du 10 mars 2017 au soutien de l’amendement Barbier ;
– courrier au candidat aux élections présidentielles, Emmanuel Macron.
VIAPL